Blog · Interview de Thibaud Duchosal, entrepreneur, producteur & parrain du réseau “Réal Connect

crédits photo : le DL/E.D

Thibaud Duchosal est un personnage incontournable dans l’univers de la production et de la diffusion de contenus audiovisuels outdoor. Athlète, producteur, organisateur de festival… Thibaud a occupé toutes les positions et a beaucoup de recul sur les différents challenges auxquels font face les réalisateurs, les producteurs et les diffuseurs. Très investi dans l’écosystème audiovisuel outdoor, Thibaud rejoint le réseau Réal Connect en tant que parrain.

Salut Thibaud. Peux-tu te présenter ? Quel est ton parcours dans l’audiovisuel outdoor ? Quels films as-tu produits ?

Thibaud : “À l’origine, je suis skieur professionnel. J'ai commencé ma carrière par l'image et la photo, puis j’ai évolué rapidement ensuite vers des voyages et des petits films, à une époque où il n'y avait pas de plateformes et pas de réseaux sociaux. De fil en aiguille, j'ai aussi fait de la compétition. Cela m'a permis de me faire connaître auprès du grand public. La particularité du ski freeride, c’est que c’est un sport dans lequel on peut devenir professionnel autant par le biais de l’image que par le biais de la compétition. Il se trouve que j'avais des sponsors qui aimaient bien le côté image. J’ai démarré au tout début des réseaux sociaux, en 2010. J'ai rapidement sorti mon premier film et j'ai participé à d'autres films en tant que skieur. J’étais parfois déçu des choix faits aux montages, alors j'ai monté ma propre boite de production audiovisuelle, Eye Of The Storm. On a fait une douzaine de films, axés aventure, ski, activités sportives et grands espaces.
Les plus connus sont “Elbrus”, qui a gagné beaucoup de prix en festival, “Persévérance”, un film sur le free skieur suisse Richard Amacker, “The Empire of Winds”, “Sedna” ou encore “Southern Tales”, qui sont sur Netflix et Uptrack.”

Quels conseils donnerais-tu à un producteur débutant souhaitant se spécialiser dans les films de sport outdoor ?

Thibaud : “Il faut être patient, courageux et être prêt à perdre de l'argent. C'est une réalité. Sur une douzaine de films, j'ai investi beaucoup d'argent de ma poche. Aujourd'hui, malgré le fait que ces films aient été largement diffusés, je ne suis toujours pas bénéficiaire. Ce modèle a fonctionné pour moi car j'étais aussi athlète, donc ces activités se complétaient, mais je ne vis pas du métier de producteur. En tant que producteur dans le monde du sport outdoor, il faut être multi-casquettes et avoir une autre activité complémentaire à côté, comme réalisateur, par exemple ou athlète. Se lancer purement en tant que producteur est très compliqué, d’autant plus que les diffuseurs grand public, notamment les chaînes télé, ont peu de cases pour diffuser des sports outdoor, les financements sont donc difficiles à trouver.”

Quelles sont les difficultés majeures que tu as rencontrées dans ton parcours en tant que producteur ?

Thibaud : “Du fait de mon parcours en tant qu’athlète, je n'ai pas fait d'études et je n’avais pas d’expérience en lien avec la production audiovisuelle lorsque j’ai commencé. J'ai appris de manière autodidacte, en faisant, puis en corrigeant mes erreurs. De fil en aiguille, je suis devenu le gars qui chapeautait l'ensemble des projets avec mon pote Laurent Jamet, qui est réalisateur. J'ai été sur plusieurs marchés professionnels pour présenter notre travail, pour le vendre et pour écouter aussi ce que l’on me disait. La principale difficulté que j’ai rencontrée, c'est que l'espace télé, ou l'espace de diffusion, est très petit pour les films de sport outdoor. Le sport outdoor est une niche qui n'est pas réellement considérée par les chaînes de télévision. C'est donc un parcours du combattant pour faire son réseau et pour diffuser ses films.”

Tu as créé le Xplore Alpes Festival, un festival complet ayant lieu à Bourg-Saint-Maurice à l’automne et proposant des projections de films, des activités sportives, des conférences… Comment le Xplore Alpes est-il né ?

Thibaud : “Le Xplore Alpes Festival fête sa quatrième édition cette année. Le festival met à l'honneur la montagne dans son ensemble, avec le sport outdoor, l'aventure, la nature et l'environnement. Ce festival a pris la suite d’un plus petit festival, le Winter Film Festival, qui était un festival de films de ski et de sports outdoor d’hiver. Après le Covid, nous (ndlr: Thibaud et ses partenaires) avons voulu animer notre vallée d'une manière différente, plus importante et c'est pour cela que l’on a créé le Xplore Alpes Festival. Nous souhaitions également créer un festival plus grand public : nous avons l’amour du sport et des images et nous ne souhaitions pas mettre à l’honneur des films de sports d’hiver uniquement.”

Tu as récemment lancé le “Content Market”, un événement qui a lieu en même temps que le Xplore Alpes Festival et propose aux différents acteurs de l’écosystème audiovisuel outdoor de se rassembler, d’échanger et de débattre. Pourquoi as-tu ressenti le besoin de créer le Content Market ?

Thibaud : “Le Xplore Content Market est effectivement un marché B2B qui se déroule pendant le Xplore Alpes Festival et qui propose de mettre en relation l'écosystème des créateurs de contenus audiovisuels et l'écosystème des diffuseurs. À travers mon parcours de producteur, d'athlète, puis d'organisateur d'événements, je me suis rendu compte que nous n’avions pas accès à beaucoup d'informations pour pouvoir rentrer dans le monde de la télévision. C’est notamment en participant au MIP que je me suis trouvé esseulé et que j’ai fait ce constat. Ce qui était paradoxal, c'est que le monde de la télévision n'est pas fermé aux images et aux contenus montagne et outdoor, mais qu'aujourd'hui, les producteurs ne font pas des documentaires ou des films qui répondent aux attentes et aux besoins de la télévision. Nous avons donc d'un côté, des gens qui aimeraient diffuser plus, et de l'autre, des gens qui produisent du super contenu, mais ces deux mondes se connaissent mal.

Lors de la première édition, pour vous, Uptrack, cela vous a permis de rencontrer de nombreux réalisateurs et d’identifier de nouveaux films à diffuser. Certains réalisateurs et producteurs ont également trouvé des financements pour leurs projets. Certains projets de films sont nés sur le Content Market et seront prochainement diffusés en télévision. C'est exactement ça le but d'un marché professionnel.
C’est aussi l’occasion de faire de la veille sur les tendances, d’échanger, de débattre avec ses pairs. Dans l’outdoor, nous avons parfois tendance à nous enfermer. Le Content Market est l’occasion de s’ouvrir et de créer des connexions.”

Pourquoi as-tu accepté de soutenir le réseau Réal Connect ? Qu’en attends-tu ?

Thibaud : “Réal Connect s’inscrit dans la même lignée que le Xplore Content Market. Le but, c'est de démocratiser les contenus de sport outdoor et de montagne, c'est d'en avoir de plus en plus. Il est très important de multiplier les échanges entre les acteurs pour favoriser les collaborations.
C’est frustrant de voir de nombreux contenus exister uniquement sur YouTube alors qu'il est possible de bien mieux valoriser notre travail. Soutenir cette initiative, c'est soutenir finalement l'industrie, soutenir les mises en relations, soutenir la naissance de nouveaux projets. Cela a notamment de la valeur pour les jeunes. Si on peut leur permettre de gagner du temps, cela sera bénéfique pour l’industrie des sports outdoor. Le fait de produire plus d’images permet de développer la médiatisation de nos sports et aide les athlètes à trouver des partenaires. C’est un cercle vertueux.”

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